dimanche 17 septembre 2006


J'ai parfois l'impression que mes journées se décomposent en une multitude de petits instants déconnectés les uns des autres. Des sortes de coupures de papier, celles qu'on utilise pour le scrapbooking et qui s'envolent au moindre courant d'air; ou bien ces instantanés kodak qu'on perd infailliblement au fond d'une boite à chaussure et qui finissent par viellir et se décolorer.
Les journées sont majoritairement guidées par une ligne conductrice quelconque. Les miennes font exception à cela. oh! bien sûr, il y a toujours cet impératif qu'est le travail, carcan de nos imaginations et de nos improvisations, mais il ne parvient pas à régir de façon assez totalitaire ma quotidienneté pour que je puisse en tenir compte. je déambule donc dans la vie comme un oeil dont la paupière mettrait plusieurs minutes à s'ouvrir et se refermer. Seules certaines parties de l'histoire me parviennent.
Par beau temps, j'aime me promener dans les rues. Si j'adopte la bonne cadence (assez vite pour dépasser les flaneurs mais pas au point de se sentir essoufflée), je parviens à composer une musique urbaine saccadée et enlevée. je ne capte que des bribes de bruit, de voix, de sens. Un peu à la manière d'un cadavre exquis, je tisse la trame d'une histoire sans en connaitre les étapes.
Jeudi dernier, malgré la pluie, je suis sortie prendre un peu l'air. au cours de mes périgrinations, je me suis laissé surprendre par le rire franc et gigantesque d'une inconnue assise sur le rebord de sa fenêtre; un rire monstrueux, digne des meilleures sorcières de Disney. Le bipbip d'une alarme, me rappelant en tous points celui de mon premier réveil d'enfant, suivi par le crissement de pneu d'une poussette et l'aboiement lointain d'un petit chien m'ont rapidement tirée de ma rêverie. Un cliquetis metallique m'a alors amenée à decouvrir une immense armure de fer, copie parfaite de celle de lancelot du lac, posée le plus naturellement du monde sur le balcon d'un petit monsieur à l'allure chips et canne de bierre. Mais c'est en tournant sur la rue Hochelaga que j'ai aperçu la perle de ma journée. Alors que la pluie faisait des siennes, et que je me battais moi-même avec mon propre parapluie, j'ai vu de l'autre coté de la rue cette apparition magique et farfelue: un travailleur assis au volant d'un monte-charge, un parapluie fushia planté à travers l'ouverture du toit.
Ces anecdotes forment les chapitres de mes journées. Si je ne les note pas, elles finiront alors par se décolorer et blanchire jusqu'à ce qu'on n'y voit plus qu'un fantôme de souvenir.

jeudi 14 septembre 2006

Mes premiers pas

C'est étrange d'écrire pour quelqu'un (car qui écrit pour lui-même sur un blog accessible à tous?) sans savoir si cette personne sera ou non au rendez-vous. J'ai souvent écris à des correspondants invisibles durant mon adolescence. J'ai l'impression de retrouver la même sensation: ce réconfort de pouvoir se livrer à quelqu'un et, en même temps, la frustration de ne jamais recevoir de réponse.
Il y a bien longtemps que je n'ai pas écrit. Ni à aucun correspondant invisibles, ni même à moi-même. J'avais élaboré une théorie voilà deux ans passés. Alors que toute mon adolescence et tout le début de ma vie d'adulte s'était déroulé sous un amoncellement de feuilles noircies à l'encre Waterman, mon arrivée impromptue dans ce pays y avait brusquement mis fin. La raison de cela? La vie. Une soudaine plongée dans la vie; la vraie. Pas celle des romans, des feuilletons américains pour adolescents, ou des rêves éveillés. Une vie simple faite de découvertes, de sorties, de rire et d'amitiés. Pour la première fois, j'étais l'héroïne de l'histoire et je n'avais, pour cela, recours à aucun subterfuge. L'écriture est soudain devenue obsolète.
Pourquoi y revenir aujourd'hui alors? Est-ce à cause de la pluie? En fait, c'est un simple concours de circonstances. Je me retrouve en effet clouée chez moi pour quelques jours à cause d'une pneumonie (quand les docteurs m'ont annoncé la nouvelle, je me suis décomposée sur place. "une pneumonie? mais non, vous plaisantez! n'est-ce pas..?" pour moi, la pneumonie est synonyme de sanatorium, de mort lente, de maladie démodée. Je ne peux m'empêcher de repenser à tous ces romans du XIX eme siecle mettant en scène des personnages agonisants dans leurs draps gelés au fin fond des quartiers pauvres de la capitale. Cependant, selon mon docteur, il n'y a pas là de quoi s'inquiéter et tout devrait rentrer dans l'ordre d'ici une quinzaine de jours. ouf! juste une quinzaine de jours à m'arracher les poumons, ça me rassure!). Me voilà donc à la maison avec des heures de liberté devant moi et, bien sûr, rien à faire. Pas de vidéos à regarder, aucun livre à lire (j'en ai bien deux de commencés mais je n'arrive pas à les finir) et très peu le goût de sortir. je pense alors à un de mes amis possédant, lui aussi, un blog. je m'en vais y faire un tour et, de lien en lien, je passe toute ma matinée à lire les écris des autres. Cela en devient grisant et je décide tout à coup de me lancer moi aussi dans cette aventure. Nous verrons bien où elle nous mènera.
En attendant, je vous laisse sur ces premiers pas.