dimanche 14 octobre 2007

1997


George et Margaret

Les jours heureux

Treize à table

Art.

Amélie, Agnès, Nathalie, Elodie, Anne-Sylvie, Barbara, Jérémy.

Patrick Noppe.


Projecteur sur le passé.

Act 1.


jeudi 11 octobre 2007

En Train

Paris. Gare du Nord.
RER D.

Gris. Silencieux. Rapide.

On est ballotté sur son siège. Un roulis apaisant. Je ne vais pas tarder à m'endormir. Il n'y a pas grand monde dans le wagon.

Lundi matin. 10h28. Gare du Nord.

Je ne veux personne à côté de moi. Personne qui murmure ou qui respire. Personne qui entre dans ma bulle. Elle est à moi. Protectrice. Enveloppante. Rassurante. Je porte l'odeur de chez J. Un parfum de bien-être et de réconfort. Il fait doux chez J. C'est un îlot de bonheur et d'espoir. Un endroit hors du temps et hors espace. On s'y installe confortablement. On laisse son corps se détendre. La bulle de bonheur s'agrandit autour de nous. Il fait doux chez J. Il y a les rythmes slaves et africains, les couleurs chaudes de la terre, la lumière claire des étoiles. Nos corps et nos rires s'entremêlent. Pareils à quatre naufragés ayant trouvés place sur un canot de sauvetage, nous reprenons notre souffle en nous tenant la main. On se laisse alors gagner par la douceur, sans y prendre garde. On oublie l'espace d'un instant que le danger nous guète, que l'océan est sombre à l'horizon et que la tempête couve. Pendant deux jours, nous ne sommes plus sur terre, sur cette terre. Il fait bon vivre chez J. car nous sommes loin de tout et si près de l'essentiel. Deux jours d'intense bonheur. Deux jours intenses. Du bonheur. Il fait doux chez J.
Soupir sous la brume.


Le train continue de rouler. 10h43. Villiers le bel.


Je suis de passage. Sans valise. Sans titre de transport. Il y a trop à dire ou pas assez. Les voyageurs ne font que passer autour de moi. Ils frôlent mon épaule sans m'apercevoir. Je sens leur présence agressive. Ils descendent tous cependant et je me retrouve seule dans le wagon. Tout file. Trop vite. Je n'ai pas d'emprise sur le temps. Les minutes ont recommencé à couler. La bulle va éclater. Je garderai ton odeur plusieurs jours encore. La marque de ton corps que j'imagine contre le mien. Je sentirai ton regard sur ma nuque, tes lèvres dans mon cou. Ma bulle résistera encore un peu à la pression de la réalité. Tu t'envoles déjà pourtant. Dans cet ailleurs que je croyais tenir entre mes doigts. Cet imaginaire partagé.
Il n'est plus mien. Il ne l'a jamais vraiment été.
Me manqueras-tu? Je perçois déjà que le manque va rester dans la bulle. Il ne rejoindra pas la réalité. Comment pourrais-tu me manquer? N'y a-t-il pas juste ce que l'on a connu qui puisse nous manquer?


Survilliers-Fosses. 10h55. Terminus.


La brume ne se lève pas. Irréalité de l'image /paysage. Humidité du rêve. Il fait froid dehors. Derrière la vitre du train, je vois ton visage s'effacer. J'ai froid.

J'ai subitement hâte d'être chez moi. Mon avion part demain. Il faudra penser à remercier J. pour la bulle. Je l'emporte serrée contre mon coeur. Bulle de tendresse. Comme J.
Quant à toi, je te laisse là. Tu ne viendras pas.
Mais il faudra faire attention.

Il fait froid dehors.



samedi 29 septembre 2007

Dans les yeux des autres

jeudi soir. 18h16. alors que mon bras se perd littéralement à l'intérieur de mon sac (note à moi-même: ne plus acheter de sac à main de la taille d'une valise) à la recherche de mes clés d'appartement, ma petite voisine s'approche avec sa trottinette et me lance, pleine de sollicitude: "vous avez perdu quelque chose, Madame?"

Vendredi soir. 20h05. je règle mes achats chez Simmons. la discussion s'engage avec la gentille-vendeuse-qui-n'a-pas-cherché-à-me-vendre-toute-la-boutique. elle doit avoir dans les vingt ans, tout au plus. souriante. chaleureuse. nous échangeons quelques bonnes adresses de lingerie. avec un petit clin d'oeil coquin, nous évoquons ces "occasions spéciales" pour lesquelles nous aimons la dentelle et les couleurs vives. on étouffe quelques rires. et voilà qu'au moment de partir, elle me dit d'un ton désinvolte : "bonne soirée à vous aussi, Madame".

serais-je à un tournant de ma vie??

samedi 22 septembre 2007

si

Si, par hasard, malgré mes promesses aux Dieux et aux étoiles, malgré mes supplications et mes larmes, malgré ma confiance et mon désir sans borne, si malgré tout ça, je ne devais pas embarquer dans cet avion, je prendrais alors le volant d'une décapotable pour oublier.

Mon sac de voyage dans le coffre, je passerais la frontière au petit matin, les cheveux au vent, de vieilles lunettes fumées sur le nez et la musique d'Almost Famous dans les oreilles. Après un bref arrêt aux douanes américaines, seule sur la route, le soleil très bas sur l'horizon, je filerais vers Boston et son océan. J'irais m'asseoir sur le sable ou les quais et laisserais mon regard se perdre au loin, fixer un ailleurs où je ne suis pas, un pays que je n'atteins plus, une vie qui s'éloigne de moi. Je regarderais les goélands s'envoler vers cette terre promise, cette vieille patrie. La terre de ma naissance; celle qui a vu grandir mes ambitions mais qui ne les a pas vues se réaliser. La terre de mes amis; celle de leur quotidien. La terre de ma langue et de ma littérature; celle du connu et du sécuritaire.

Pendant trois jours, je resterais assise là, au milieu des souvenirs et des vacanciers. Et après avoir perdu le fil du temps et senti le vent tomber, j'irais marcher le long de l'eau, regard tourné vers la terre américaine. J'oublierais le cri des oiseaux, les avions et les désirs. J'oublierais ce que je faisais là; ce qu'il y avait derrière le bleu du ciel. Le chemin de Montréal me ramènerait à la réalité. Chaque kilomètre serait une parcelle de ce que je suis devenue en vivant ici, un extrait de mon être. Des kilomètres posés volontairement entre ici et là-bas.

Si, par hasard, je ne devais pas embarquer, bien sûr.

jeudi 13 septembre 2007

En route

"Paris. Charles de Gaulle. terminal 2F. Il fait présentement 11 degrés celsius au sol. Le ciel est couvert. Il est 8h30, heure local. Vous trouverez vos bagages sur le tapis 35. Pour les vols en correspondance, la navette interne vous attendra aux portes de l'avion. Tunis, La Réunion, et Abidjan, Terminal 1. Lyon, Toulouse et Marseille, Terminal 2 B. Merci d'avoir voyagé avec Air France. Nous vous souhaitons un agréable séjour et espérons vous revoir prochainement sur nos lignes".
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Ses yeux sont gonflés par le sommeil. Sa bouche est sèche. Elle cherche sa gourde qu'elle trouve au fond de son sac, juste à côté de cet énorme pavé qu'elle s'est acheté avant de monter dans l'avion. Une lecture de survie pour faire face à l'attente, à l'angoisse et à cette longue nuit de doutes et d'incertitude. Le sommeil l'a attrapée par surprise cependant. L'avion n'avait pas encore atteint son altitude de croisière qu'elle n'arrivait plus à suivre le discours de son voisin de droite. Quelques minutes après, elle dormait. Il ne l'a pas réveillée pour le repas du soir. Il a simplement déplié sa couverture et l'a déposée sur ses genoux. Il a veillé sur ses rêves comme on veille un enfant malade, comme on regarde celle qu'on aime après l'amour. Alors que l'avion s'enfonçait dans le ciel d'encre, il l'a laissé appuyer sa tête sur son épaule.
"...vous revoir prochainement sur nos lignes". Elle ouvre les yeux et se rend compte de l'étrangeté de la situation. Elle réajuste sa position, replie sa couverture et récupère ses chaussures. Comme elle n'a pas le droit de décrocher sa ceinture de sécurité, le moindre de ses mouvements lui demande un effort considérable. Cette gorgée d'eau lui fait du bien.
Elle ne veut pas parler. Elle ne souhaite pas mettre de mots sur cette nuit, sur son comportement. Elle réserve ses paroles pour d'autres visages; ses explications pour d'autres dialogues. Cet homme si prévenant, cet étranger, semble comprendre ce qu'elle attend de lui. Il ne brise pas le silence par quelques platitudes inutiles. Lorsqu'elle quitte son siège et s'éloigne dans l'allée, il laisse même quelques personnes s'infiltrer entre eux. Elle se retourne une dernière fois et lui sourit enfin.
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Tapis 35: Montréal / Pierre-Elliot Trudeau (YUL)
Les arrivées sont une antichambre du monde. Une antichambre heureuse cependant. On y entend la rumeur du dehors, quelques bribes de nouvelles, plusieurs langues différentes; on y aperçoit un coin de ciel mais on n'est jamais sûr de la couleur. C'est un avant-goût des vacances ou bien une dernière barrière à franchir avant de pouvoir raconter ses souvenirs. Les gens rient, parlent fort, pleurent aussi parfois. Mais ce ne sont pas des adieux, ce ne sont pas des déchirements. Il y a bien sûr des voyageurs solitaires que personne n'attend jamais, ceux qui prennent des taxis pour rentrer chez eux, ceux qui voyagent léger, sans cadeau ou souvenir. Mais la plupart du temps, il y a ces mains qui s'agitent de l'autre côté de la vitre et qui cherchent à attirer un regard. Il y a ces sourires en abondance; cette impatience transparente.
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La jeune fille aux yeux plein de sommeil se cache pourtant derrière un des piliers. Pliée en deux, elle cherche à reprendre son souffle, à retrouver une contenance. Elle s'assoit un moment. Elle fouille dans son sac et reprend une gorgée d'eau. Ses mains sont moites, si bien qu'elle en échappe presque sa bouteille. Elle se recoiffe, s'observe un instant dans le miroir. L'image qu'il lui renvoie ne lui ressemble pas. Qui est cette femme? Que fait-elle loin de chez elle? Ces yeux si pleins d'attentes et d'angoisses sont-ils vraiment les siens? Pourquoi avoir fait tant de kilomètres? Elle sort son carnet de notes et relit le courriel qu'elle a imprimé et qu'elle a glissé à l'intérieur avant de partir: " Je t'attendrai aux arrivées. Tu peux compter sur moi".
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Son sac sur l'épaule, elle s'avance alors vers les portes vitrées. Il est là. Il agite les mains et sourit. Comme il se doit. Son vol de retour est à 18h00. Il lui reste donc 9h30 pour répondre à ses questions...

samedi 4 août 2007

Mon vrai Toit

mon vrai toit est ici maintenant. je vais essayer de transférer mes archives. 20 six vient de supprimer, sans avertissement aucun, tous les posts de 2007. arrrghh! j'avoue que j'ai failli piquer une vraie crise. larmes, rage, désespoir. bon, bon, n'exagérons rien! mais il est vrai que je n'avais rien sauvegardé. (je travaille toujours direct sur mon blog. ça m'apprendra!)
heureusement, mon cher Grégor, magicien à ses temps perdus, a réussi à rembobiner mes larmes et mes cris, et il a fait sortir de son chapeau un joli bouquet de textes anciens. merci!

dimanche 22 juillet 2007

Montréal

J'aime Montréal. Follement.

Beaucoup d'immigrés disent aimer le québec. Oui, bien sûr, comment ne pas aimer ce pays? Mais moi, mon coeur s'est arrêté à Montréal. Il y est resté figé. Cette ville l'a happé tout entier.
Mon corps vibre pour cette ville. Il est cette ville. Il n'y a ni barrière, ni barbelés pour nous séparer. Je suis et je resterai une partie de cette île urbaine et cosmopolite.

J'aime Montréal. Comme je n'ai probablement jamais aimé personne.

Les odeurs des usines à pain; les ruelles bondées d'enfants; les nids-de-poule et les rues trop étroites; les parcs si verts et si grands qu'ils laissent un goût de randonnée dans nos chaussures; l'élégance de Mado; le courage des joggeurs matinaux; le pont Jacques Cartier qui nous offre la plus belle image du monde quand on rentre de week-end et que la nuit tombe sur les buildings; les escaliers extérieurs bleus, pis roses, pis verts, pis jaunes; le marché Jean-Talon et son overdose de couleurs et d'odeurs; les pistes cyclables qui nous laissent croire que l'Asie est à deux coups de pédales; les sandwichs à étages du Santropol; les films décalés du cinéma du Parc; les terrasses ensoleillées.

Oui, j'aime Montréal. Je ne m'en rends jamais aussi compte que lorsque je quitte la ville pour quelques jours.

Je suis chez moi ici. Cette ville a toujours été en moi. Processus de reconnaissance mystique. Symptomes physiques du manque et du plaisir assouvi.

Montréal est en moi comme je suis en elle.

J'aimerais parfois y être avec toi.