samedi 11 novembre 2006

Choc

ça arrive par vagues, sans prévenir. chaos d'images et de sentiments. mon ventre se crispe, se retourne, se mortifie; cherche à se débarrasser d'un poids.

coup du coeur en pleine tête. mes genoux heurtent le sol dans un bruit mat. hémorragie occulaire. je me vide en syncope. un dernier souffle mélangé à ma voix que je ne reconnais pas.

ça va passer.

jeudi 9 novembre 2006

Comme beaucoup d'autres avant moi, je crois aux coïncidences et quelquefois à un don de voyance chez les romanciers- le mot "don" n'étant pas le terme exact, parce qu'il suggère une sorte de supériorité. Non, cela fait simplement partie du métier: les efforts d'imagination, nécessaires à ce métier, le besoin de fixer son esprit sur des points de détail- et cela de manière obsessionnelle- pour ne pas perdre le fil et se laisser aller à sa paresse-, toute cette tension, cette gymnastique cérébrale peut sans doute provoquer à la longue de brèves intuitions "concernant des évènements passés ou futurs", comme l'écrit le dictionnaire Larousse à la rubrique " Voyance". (Patrick Modiano, Dora Bruder, Gallimard, 1997)
devrais-je m'acheter des lunettes ou m'inscrire à un cours d'aérobic?

dimanche 5 novembre 2006

Amphibisme

Pourquoi les dimanches doivent-ils toujours avoir la même saveur? Quelques fois, par pur hasard, un petit miracle se produit. Le soleil décide de nous faire un clin d'oeil. La route continue après le tournant et mène au Mont-Royal. Le téléphone sonne et le chat pointe son bout de nez.

Mais aujourd'hui, il n'y a pas de miracle. Pas de magie. Tout juste la banalité tragique de la pluie. Alors je rejoue Aquanaute. Un disque amphibie. À écouter dans son bain. les matins gris. les après-midi d'ennui. les nuits trop longues de solitude et d'attente. Attente d'un coup de fil; d'un sésame qui nous ouvrirait la porte d'un coeur déjà trop chargé. Mais ce sésame ne vient pas souvent. Alors on appuie, machinalement, sur le bouton "rejouer". Le disque repart. Nos rêveries avec. J'ai longtemps attendu ton appel. Trop longtemps peut-être. Et puis un jour, j'ai cessé d'écouter Arianne. Je lui ai donné congé. Pour quelques mois.

Concert ce vendredi. le sien justement. Pourquoi n'ai-je pas réussi à me laisser emporter? La musique attaquait mes oreilles. Les mots coulaient sur mes yeux. Et je ne la reconnaissais pas. J'ai mis quelques heures à comprendre que ce n'était pas elle, mais moi, que je ne reconnaissais plus. Sentiment d'ivresse aigüe. lassitude. déception. bien-être naïf.

L'époque que je pensais retrouver a définitivement sombré dans les abysses d'une autre histoire. Tu n'es plus. Le point est enfin final.

Le deuil est fatigant mais rapide. Je suis une autre. Sans toi. Parfois, cette autre me ressemble. Parfois, je me surprends à sursauter devant l'image que me renvoient ses yeux. Comme Arianne, je remixe les limbes du passé. Je ne m'appartiens plus vraiment et pourtant je suis toute à moi.

"parce que l'on a tant besoin que l'on ait besoin de nous" dit la chanson. Tu es enfin autonome. Mon rôle n'a plus d'importance. La pièce, ta pièce, finira sans moi. Tu peux voyager seul. Moi, je vais commencer par visiter le port; respirer l'air nouveau. J'emmènerai probablement Arianne. simplement pour la confronter à l'eau.

mercredi 1 novembre 2006

nouveau concept. nouvelle heure.
nouvelle folie?
je cherche désespérément un sens à ma vie. je parle beaucoup ces temps-ci. de ce que je pourrais faire. de ce que j'aimerais changer. je passe mes journées dans un quasi-rêve. les gens défilent devant moi, leurs bras chargés de fantasmes, de voyages, d'autres vies. des vies que j'aimerais vivre jusqu'à la dernière page, jusqu'à épuiser l'encre des heures et sentir la poussière des bibliothèques. mais je me contente de les voir passer. comment faire pour retenir un peu de cette magie? comment décider, se mettre en mouvement et écrire ma propre histoire?

"Elle prenait la vie comme un livre qu'elle commençait par la finNe voulait surtout pas choisir pour ne jamais renoncer à rien" dit la chanson. peut-être y-a-t-il un peu de ça aussi...Choisir implique de laisser des choses en arrière. considérer les options et décider de la meilleure. pour soi. sur le moment et pour les prochains siècles. comment renoncer à des chemins pavés de pensées et de nuages moutonneux? comment trouver le courage d'affronter la vraie vie, celle, tangible, des petits-déjeuners, des comptes à payer, des échecs aussi, parfois.

mais rêver reste la plus belle aptitude de l'homme. rêver ces multiples voies, ces nombreux "road-trip", ces amours veloutées. alors je rêve. je nage dans cette douceur. je te vois, toi. tu es à la fois mon metteur-en-scène, ma réplique et mon public tout entier. tu es le créateur et la création. l'oeuvre dans son entier. puissance magique des matins brumeux. ne m'en veux pas de te garder ainsi prisonnier. un jour, je me réveillerai. et alors, je serai assez grande pour te rendre ce que je t'ai volé. en attendant, embarque avec moi dans cette décapotable américaine.

tu peux choisir la couleur; ce n'est qu'un rêve.

mercredi 18 octobre 2006

L'attaque du Mille-pattes

il y a des matins comme ça où tout va trop vite. à peine réveillée, les évènements s'enclenchent et défilent sous nos yeux à toute vitesse. les minutes s'affolent. sur le coup, le réveil en oublie l'heure et sonne quelques quinze minutes après son horaire habituel. la panique se poursuit dans la cuisine où même le présentateur radio avale ses mots sans les macher, la musique semble fixée sur ''avance rapide'' et la pub disparaît mystérieusement. dans la salle de bain, c'est une toute autre histoire. la douche coule si lentement sur mon visage qu'elle m'entraine dans une torpeur bienvenue. mais à peine sortie de cette brume bienveillante que la vitesse me redonne le tournis. je cours je cours je cours. d'une pièce à l'autre; d'une pensée à l'autre.
et soudain, je le vois. il fonce vers moi. toutes pattes dehors, tête tendue et corps ondulé. il avance à une allure d"au moins 30 noeuds. sans réfléchir, n'écoutant que mon angoisse, j'abats mon chausson fleuri sur son corps démesuré. un bruit mat illustre la mort de ce mille-pattes: pok. puis tout s'arrête. les minutes s'égrennent de nouveau lentement. le présentateur, au loin, dans la cuisine, parle d'une voix audible.
et je vais avoir mon bus.
et si 2 et 2 ne faisait pas 4
et si le soleil ne revenait pas demain matin
et si la 24 ne courait plus sur Sherbrooke
et si les nuages ne formaient plus de baleines géantes
et si rêver les yeux au plafond n'apportait pas l'inspiration
et si la caresse de ta main n'avait plus rien de romantique
et si l'océan n'était plus rempli de plancton
et si le Ré ne venait plus après le Do
alors il ne me resterait qu'à devenir un amalgame de roches, un caillou, un quartz. boire un peu, beaucoup, passionnément. avaler des pilules, des couteaux, des amants. ouvrir la fenêtre et laisser les particules s'envoler.
mais je vois déjà les rayons du soleil se profiler. mon saxophone se trompe un peu mais donne encore la note juste. quant à ta main, elle fait toujours frissonner la mienne.
je ne mourrai pas encore cette nuit.

dimanche 17 septembre 2006


J'ai parfois l'impression que mes journées se décomposent en une multitude de petits instants déconnectés les uns des autres. Des sortes de coupures de papier, celles qu'on utilise pour le scrapbooking et qui s'envolent au moindre courant d'air; ou bien ces instantanés kodak qu'on perd infailliblement au fond d'une boite à chaussure et qui finissent par viellir et se décolorer.
Les journées sont majoritairement guidées par une ligne conductrice quelconque. Les miennes font exception à cela. oh! bien sûr, il y a toujours cet impératif qu'est le travail, carcan de nos imaginations et de nos improvisations, mais il ne parvient pas à régir de façon assez totalitaire ma quotidienneté pour que je puisse en tenir compte. je déambule donc dans la vie comme un oeil dont la paupière mettrait plusieurs minutes à s'ouvrir et se refermer. Seules certaines parties de l'histoire me parviennent.
Par beau temps, j'aime me promener dans les rues. Si j'adopte la bonne cadence (assez vite pour dépasser les flaneurs mais pas au point de se sentir essoufflée), je parviens à composer une musique urbaine saccadée et enlevée. je ne capte que des bribes de bruit, de voix, de sens. Un peu à la manière d'un cadavre exquis, je tisse la trame d'une histoire sans en connaitre les étapes.
Jeudi dernier, malgré la pluie, je suis sortie prendre un peu l'air. au cours de mes périgrinations, je me suis laissé surprendre par le rire franc et gigantesque d'une inconnue assise sur le rebord de sa fenêtre; un rire monstrueux, digne des meilleures sorcières de Disney. Le bipbip d'une alarme, me rappelant en tous points celui de mon premier réveil d'enfant, suivi par le crissement de pneu d'une poussette et l'aboiement lointain d'un petit chien m'ont rapidement tirée de ma rêverie. Un cliquetis metallique m'a alors amenée à decouvrir une immense armure de fer, copie parfaite de celle de lancelot du lac, posée le plus naturellement du monde sur le balcon d'un petit monsieur à l'allure chips et canne de bierre. Mais c'est en tournant sur la rue Hochelaga que j'ai aperçu la perle de ma journée. Alors que la pluie faisait des siennes, et que je me battais moi-même avec mon propre parapluie, j'ai vu de l'autre coté de la rue cette apparition magique et farfelue: un travailleur assis au volant d'un monte-charge, un parapluie fushia planté à travers l'ouverture du toit.
Ces anecdotes forment les chapitres de mes journées. Si je ne les note pas, elles finiront alors par se décolorer et blanchire jusqu'à ce qu'on n'y voit plus qu'un fantôme de souvenir.

jeudi 14 septembre 2006

Mes premiers pas

C'est étrange d'écrire pour quelqu'un (car qui écrit pour lui-même sur un blog accessible à tous?) sans savoir si cette personne sera ou non au rendez-vous. J'ai souvent écris à des correspondants invisibles durant mon adolescence. J'ai l'impression de retrouver la même sensation: ce réconfort de pouvoir se livrer à quelqu'un et, en même temps, la frustration de ne jamais recevoir de réponse.
Il y a bien longtemps que je n'ai pas écrit. Ni à aucun correspondant invisibles, ni même à moi-même. J'avais élaboré une théorie voilà deux ans passés. Alors que toute mon adolescence et tout le début de ma vie d'adulte s'était déroulé sous un amoncellement de feuilles noircies à l'encre Waterman, mon arrivée impromptue dans ce pays y avait brusquement mis fin. La raison de cela? La vie. Une soudaine plongée dans la vie; la vraie. Pas celle des romans, des feuilletons américains pour adolescents, ou des rêves éveillés. Une vie simple faite de découvertes, de sorties, de rire et d'amitiés. Pour la première fois, j'étais l'héroïne de l'histoire et je n'avais, pour cela, recours à aucun subterfuge. L'écriture est soudain devenue obsolète.
Pourquoi y revenir aujourd'hui alors? Est-ce à cause de la pluie? En fait, c'est un simple concours de circonstances. Je me retrouve en effet clouée chez moi pour quelques jours à cause d'une pneumonie (quand les docteurs m'ont annoncé la nouvelle, je me suis décomposée sur place. "une pneumonie? mais non, vous plaisantez! n'est-ce pas..?" pour moi, la pneumonie est synonyme de sanatorium, de mort lente, de maladie démodée. Je ne peux m'empêcher de repenser à tous ces romans du XIX eme siecle mettant en scène des personnages agonisants dans leurs draps gelés au fin fond des quartiers pauvres de la capitale. Cependant, selon mon docteur, il n'y a pas là de quoi s'inquiéter et tout devrait rentrer dans l'ordre d'ici une quinzaine de jours. ouf! juste une quinzaine de jours à m'arracher les poumons, ça me rassure!). Me voilà donc à la maison avec des heures de liberté devant moi et, bien sûr, rien à faire. Pas de vidéos à regarder, aucun livre à lire (j'en ai bien deux de commencés mais je n'arrive pas à les finir) et très peu le goût de sortir. je pense alors à un de mes amis possédant, lui aussi, un blog. je m'en vais y faire un tour et, de lien en lien, je passe toute ma matinée à lire les écris des autres. Cela en devient grisant et je décide tout à coup de me lancer moi aussi dans cette aventure. Nous verrons bien où elle nous mènera.
En attendant, je vous laisse sur ces premiers pas.